Yoko Ono, Lumière de L’aube au Mac Lyon

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Yoko Ono, We Are All Water, 2006 L’artiste dans son installation, We Are All Water, YOKO ONO: BETWEEN THE SKY
Yoko Ono, We Are All Water, 2006 L’artiste dans son installation, We Are All Water, YOKO ONO: BETWEEN THE SKY

Yoko Ono, celle que l’on a longtemps surnommée « Miss Oh No ! » s’apprête à envahir le musée d’art contemporain de Lyon qui lui consacre une exposition géante du 9 mars au 10 juillet 2016.

La grande dame de l’art conceptuel, membre crucial de l’Avant-garde new-yorkaise dans les années 1960, tout à la fois cinéaste, peintre, sculptrice, musicienne, poète, écrivaine, actrice, danseuse et surtout pionnière de la performance, avance sans répit, ne cessant de nous surprendre. Elle se dit sorcière et il est vrai que sa tendance à se démultiplier dans les projets porte à le croire… Les rétrospectives que lui consacrent les grands musées se succèdent, et après le MoMA de New York, le MAC Lyon lui rend hommage à travers une centaine d’œuvres revisitant soixante années de carrière, de 1952 à 2016.

« Yoko Ono, lumière de l’aube », est un voyage dans l’univers de l’artiste, une ballade dénuée de chronologie, où se succèdent vidéos, peintures, installations célèbres ou récentes de celle qui participa à l’un des courants artistiques les plus importants du XXe siècle, Fluxus.

Yoko Ono est née en 1933 à Tokyo au sein d’une des familles commerçantes les plus riches du Japon, les Yasuda. Son enfance luxueuse et privilégiée qui lui permettra de profiter d’une riche éducation multiculturelle sera bouleversée par la seconde guerre mondiale qui plongera sa famille dans une profonde misère, ce qui forge très vite son caractère. Emigrée à New York, Yoko se destine dès l’adolescence à l’art et particulièrement à l’écriture, montrant déjà une attirance très nette vers l’avant-gardisme. Assidue du milieu théâtral, elle suit parallèlement des études de philosophie, des cours de lettres et de chant, et réalise très jeune de la musique expérimentale, des installations conceptuelles et de la performance.

1955 est l’année de la publication de son poème A Grapefruit in the World of Park, dialogues absurdes et faussement naïfs entre une mère et son enfant dans Central Park. Au début des années 60, elle organise, en collaboration avec le compositeur expérimental La Monte Young, une série pluridisciplinaire de concerts/expositions et fréquentent les grands noms de l’art contemporain qui entreront dans l’histoire de l’art, entre autres la collectionneuse Peggy Guggenheim et le Dadaïste Marcel Duchamp.

Au même moment, Ono développe un format artistique sous forme de partitions textuelles, et George Maciunas, le fondateur de Fluxus, programme la première exposition de Yoko en son AG Gallery. Après un bref retour au Japon où elle se produit au Sõgetsu Art Center de Tokyo, elle collabore activement aux actions de Fluxus dès son retour à New York, devenant un jalon de l’histoire de l’art, et plus précisément du courant féministe en art.

C’est en 1966, à la veille du vernissage de son exposition à la galerie Indica, qu’elle rencontre John Lennon. Ce dernier découvre l’univers de l’artiste conceptuelle qui entre intimement en résonance avec ses aspirations intellectuelles et artistiques. Lorsque le galeriste demande à Yoko de le laisser enfoncer un clou sur l’une de ses œuvres, elle refuse prétendant que la planche doit être intacte pour le lendemain. John propose alors de payer cinq shillings imaginaires pour planter un clou imaginaire. Il racontera plus tard : Il y avait une échelle suspendue au plafond, menant à une peinture. On aurait dit une toile vierge avec une chaîne à l’extrémité de laquelle pendait une loupe. J’étais anti-art parce que j’avais passé cinq années dans une école d’art et qu’ils étaient tous bidon et j’étais vraiment contre. Mais en visitant les galeries je m’y étais de nouveau intéressé et j’étais là. J’ai escaladé l’échelle et pris la longue-vue, je me balançais là-haut et dans une écriture minuscule ça disait simplement « Oui ». Et c’est ce qui m’a décidé à rester. Ça disait « Oui ». Ça m’a décidé à voir la suite de l’exposition. Si ça avait dit « Non » ou quelque chose de méchant ou de sarcastique, du genre « Arnaque » ou je ne sais quoi, j’aurais quitté la galerie sur-le-champ. Parce que c’était positif et que ça disait « Oui », je me suis dit : « OK, c’est la première exposition où je vais qui me dit quelque chose de chaleureux ». Alors j’ai décidé de voir le reste de l’exposition. Et voilà comment on s’est rencontrés. Si ça avait dit « Non », je serais parti. C’était comme un truc personnel. Je suppose que quiconque lisait ça ressentait la même chose. Mais j’ai pris ça comme un « Oui » que l’artiste m’adressait personnellement.

Yoko et John multiplieront leurs échanges artistiques durant les années suivantes, le chanteur contribuera ainsi à un livre sur la musique du XXe siècle, en offrant une partition de la chanson The Word, entièrement écrite aux crayons de couleurs, présente sur l’album des Beatles Rubber Soul paru en 1965, puis sponsorisera son exposition à la Lisson Gallery de Marylebone. En mai 1968, après une nuit d’enregistrement, leur fusion devient complète et leur mariage aura lieu le le 20 mars 1969 à Gibraltar.

Photo: Yoko Ono, We Are – All Water, 2006 – L’artiste dans son installation, We Are All Water, YOKO ONO: BETWEEN THE SKY
Yoko Ono, Half-A-Room, 1967
L’artiste dans son installation Half-A-Room, pendant l’exposition Yoko Ono at Lisson: Half-A-Wind Show, Lisson Gallery, Londres, 11 octobre – 14 novembre 1967 / Photo : Clay Perry © Yoko OnoYoko

Sur le modèle des performances Fluxus d’Ono, alors que la guerre du Vietnam fait rage, Ono et Lennon entreprennent une transformation utopique du monde par l’art à travers une campagne pour la paix au Vietnam intitulée Bed-Ins for Peace à Amsterdam, entre le 25 et le 31 mars 1969, puis à Montréal du 26 mai au 2 juin 1969, où ils reçoivent dans leur lit pendant une semaine. Ils multiplient ensuite leurs apparitions artistiques et musicales et leur engagement en faveur de la paix dans le monde les rendra célèbres.

A partir de décembre 1970, Yoko publiera plusieurs albums de musique : Yoko Ono/Plastic Ono Band, qui se classe à la 183e place des charts aux États-Unis, puis un double album Fly suivi en 1972 d’Approximately Infinite Universe, qui sera souvent considéré comme son meilleur et l’année suivante de Feeling the Space. Le début des années 70 est marqué par la rupture de Yoko avec John. Elle retourne au Japon afin d’y entreprendre une brève tournée et entame l’enregistrement de son cinquième album, A Story, qui ne sera finalement commercialisé qu’en 1997.
En janvier 1975, après plus de dix-huit mois passés loin l’un de l’autre, elle officialise sa réconciliation avec John Lennon lors de la 17e cérémonie des Grammy Awards et mettra au monde Sean Taro Ono Lennon le 9 octobre 1975, jour du 35e anniversaire de John.

À partir de cet instant, John se consacre entièrement à son fils, tandis que Yoko s’occupe de gérer leurs affaires familiales en prenant les rênes des finances communes. Elle devient alors la gestionnaire de l’important patrimoine musical de son mari. En août 1980, après cinq ans d’absence dans les médias, John et Yoko décident de revenir sur le devant de la scène publique avec leur album commun Double Fantasy, qui connaît un véritable succès. En décembre de la même année, Mark David Chapman, un déséquilibré, abat John, sous les yeux de Yoko, de quatre balles de revolver. Quelques heures plus tôt, John lui avait accordé un autographe.

Yoko ralentit alors sa production artistique et se consacre entièrement à son fils Sean et à la gestion de l’empire économique de son mari, avec plus de sérieux et de professionnalisme. Elle édite des disques posthumes de John : Live in New York City, Milk and Honey et Menlove Avenue, avec de vieilles chansons ou de simples maquettes et s’unit à Paul McCartney, George Harrison et Ringo Starr dans la défense des intérêts communs des Beatles.

Yoko Ono, Cut Piece, 1965
Performance au Carnegie Recital Hall, 21 Mars 1965 / Photo : Minoru Niizuma /Courtesy Yoko OnoYoko.
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