Ruben Manuel Espinosa
Ruben Manuel Espinosa

Il y a dix jours, le journaliste Ruben Manuel Espinosa, qui a travaillé pour AVC Noticia Veracruz et qui était correspondant pour le prestigieux magazine Proceso, a été retrouvé assassiné dans le quartier Narvarte de Mexico, à un quart d’heure du centre historique. Il avait 31 ans. Quatre corps de femmes âgées de 18 à 42 ans, ont été retrouvés à ses côtés, le procureur de la ville Rodolfo Rios Garza déclarant que leur analyse avait révélé des traces de torture et de viol.

Un crime effrayant, la mort étant survenue après qu’un coup de pistolet calibre 9 mm leur ait été assigné en pleine tête…Le coup de grâce. Ruben Manuel Espinosa avait quitté il y a deux mois l’Etat de Veracruz suite à de nombreuses menaces et intimidations qu’il ne cessait de recevoir. Spécialisé dans le photojournalisme de manifestations et de mouvements sociaux, il critiquait ouvertement le gouvernement local qui l’a très vite considéré comme « gênant » comme le disait lui-même Espinosa et ainsi que l’avait déclaré dans une interview filmée et toujours en ligne, son amie activiste Nadia Vera, qui rendait officiellement responsable le gouvernement en cas d’agression à leur égard et dont le corps a été retrouvé à côté de son ami.

Cet assassinat envers un journaliste n’est malheureusement pas exceptionnel au Mexique ; selon Reporters sans frontières, plus de 80 journalistes ont été tués au Mexique au cours de la dernière décennie,  et 17 sont portés disparus, assassinat en  forte hausse  depuis l’arrivée au pouvoir en 2012 du président Pena Nieto. Darío Ramirez, directeur de l’ONG Articulo 19,  indique que, sur les 88 cas de meurtres de journalistes recensés depuis 2000, 90 % sont restés impunis et 3 % ont abouti à « des conclusions douteuses ».

Evidemment, manifestations et revendications des organisations de défense des droits humains et de la liberté d’expression au Mexique se sont multipliées dans les jours qui ont suivi, les réseaux sociaux et médias s’en faisant les relais. La première a eu lieu dans la ville de Xalapa, capitale de Veracruz, le soir même de l’assassinat, à minuit, où une centaine de personnes se sont rassemblées, la plupart des journalistes, condamnant cet acte d’une violence extrême. Les manifestants ont allumé des bougies et des brandi des banderoles avec des slogans contre le gouvernement de Veracruz.

Le gouverneur de l’Etat mexicain de Veracruz  Monsieur  Javier Duarte devrait être prochainement  entendu dans le cadre de l’enquête sur la mort du photoreporter Ruben Espinosa et de quatre femmes, a annoncé le lundi 10 août le maire de la capitale Mexico, Miguel Angel Mancera.

Mais, dix jours plus tard, qu’en est-il vraiment ?

Certes une enquête a été ouverte par le bureau du procureur de la capitale mais les invraisemblances et mensonges fusent déjà ; on parlerait de féminicide, voire même de vol et il n’est jamais fait mention du métier de journaliste d’Espinosa, ou bien c’est pour stipuler qu’il était venu à Mexico car il cherchait du travail………. Il faut l’admettre, le Mexique est devenu un pays où règne la terreur, certes pour l’ensemble de la population mais principalement pour les journalistes et il est grand temps que les autorités fédérales et locales combattent cette violation de la liberté de la presse. Le meurtre d’Espinosa doit faire l’objet d’une enquête en profondeur qui doit faire éclater la vérité pour que cette profession cesse d’être attaquée en toute impunité. « Ce qui manque, ce sont des investigations et la condamnation des coupables », a souligné durant la cérémonie Darío Ramirez, rappelant qu’Espinosa n’avait pas voulu faire appel aux mécanismes de protection mis en place par l’Etat, n’ayant pas confiance en les autorités.  Le Mexique est situé à la 148e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF en février 2015.

Photo : AFP