Georges Braque au Grand Palais

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    george braque

    Georges Braque (1882-1963) est l’un des artistes majeurs du XXème siècle. Peintre, graveur et sculpteur, il fut d’abord en tant qu’initiateur du cubisme et inventeur des papiers collés, une des figures de l’avant-garde du début du siècle avant de recentrer définitivement son œuvre sur l’exploration méthodique et sérielle de la nature morte et du paysage qui font de lui le peintre français par excellence, héritier de Cézanne, Corot, Chardin et dépositaire de la tradition classique mais aussi le précurseur de l’abstraction d’après-guerre.

    Le Grand Palais accueille une rétrospective ambitieuse de son œuvre. Toutes les périodes de sa création y sont présentées, depuis le Fauvisme jusqu’à l’œuvre ultime qui culmine dans les séries éblouissantes des grands ateliers et des oiseaux. Le parcours chronologique insiste sur les temps forts de son travail, comme le cubisme, les Canéphores des années vingt ou les derniers paysages qu’aimait Nicolas de Staël. Grâce à l’appui des collections du Musée national d’art moderne et de grandes collections internationales, il rassemble les œuvres clés de l’artiste ainsi que les séries de variations thématiques – paysages, guéridons, canéphores et l’ensemble complet du cycle des neuf Ateliers (1949-1956) réunis pour la première fois dans une exposition – qui amplifient et résument ses recherches.

    Grâce à la présence dans le parcours de cinq cabinets documentaires riches d’œuvres, de documents et de photographies (par Man Ray et Cartier-Bresson entre autres), souvent inédits, d’autres perspectives sont développées dans l’exposition : sa collaboration avec Pablo Picasso durant le cubisme ; l’étroite connivence de son art avec la musique, et sa proximité avec Erik Satie ; enfin sa complicité avec les poètes Pierre Reverdy, Francis Ponge, René Char et les figures intellectuelles déterminantes de son temps comme Carl Einstein ou Jean Paulhan. Depuis la grande rétrospective organisée par l’Orangerie des Tuileries (1973-1974), aucune rétrospective complète de l’œuvre de Georges Braque n’a été présentée à Paris.

    Commissaire de l’exposition : Brigitte Leal, conservateur général, directrice adjointe du Musée national d’art moderne – Centre Pompidou – Scénographie : Didier Blin

    Georges Braque, la bataille à plein poumons par Brigitte Leal, commissaire de l’exposition extrait de l’introduction du catalogue d’exposition

    En 1982, Dominique Bozo préfaçait, en tant que directeur du Musée national d’art moderne, le catalogue raisonné des œuvres de Braque appartenant à l’institution, établi par Nadine Pouillon avec le concours d’Isabelle Monod-Fontaine. La sortie de l’ouvrage coïncidait avec la publication du catalogue raisonné des papiers collés de l’artiste, liée à l’exposition organisée par le Centre Pompidou sous la houlette de l’un des plus exigeants connaisseurs du cubisme, Douglas Cooper.

    En quelques phrases bien senties, avec des accents convaincants, Dominique Bozo rappelait la singularité et l’ambition de l’œuvre de Braque (« L’œuvre de Braque si particulière en ce siècle, souvent mal comprise comme celle de Bonnard, s’avère en sa permanence et sa force picturale être plus que jamais la référence nécessaire »). Il dénonçait aussi la tiédeur, voire l’hostilité, de la réception critique française de cette époque, où, après la grande offensive d’après-guerre en faveur de « Braque le Patron », menée par Paulhan et la NRF, l’ardeur était retombée. Son statut d’artiste officiel de la France gaullienne (le premier à bénéficier de son vivant d’une exposition au musée du Louvre, qu’il venait de décorer), redoublé par des obsèques célébrées en grande pompe par le ministre de la Culture, André Malraux, lui avait indiscutablement porté ombrage auprès de la génération montante contestataire. Dans un pays qui avait ressenti le besoin impérieux de dépoussiérer son panorama artistique vieillissant, comment la notoriété de Braque n’auraitelle pas souffert de cette image jaunie de « maître » de l’art moderne français que lui avait renvoyée une institution (le musée d’Art moderne du palais de Tokyo) déclinante ? Dès 1950, Pierre Reverdy, le grand frère d’armes de Braque, avait prédit avec lucidité ce passage à vide : « Saura-t-on gré, plus tard, à un peintre comme Georges Braque d’avoir échafaudé, dans une époque dont nous subissons avec impatience les tumultes, une œuvre qui paraîtra à tous les yeux si sereine et si sage ? Très probablement non. Nos luttes, nos terreurs seront oubliées, il ne restera plus, du procès, que quelques impavides témoignages, et la cause, la raison du conflit, n’auront plus qu’un très mince intérêt. Les tableaux seront là, muets, irréfutables. Ces tableaux dont personne, aujourd’hui, ne sait rien dire. » Trente ans plus tard et quelque quarante ans après la dernière rétrospective parisienne montrée à l’Orangerie des Tuileries, pour le dixième anniversaire de la disparition de Braque, par Jean Leymarie, l’un des plus fins exégètes de son œuvre, s’ouvre enfin au Grand Palais l’exposition qui plaide en faveur d’une indispensable réhabilitation, amorcée depuis peu en France et bien engagée outre-Atlantique. Osons le défi de faire confiance à une génération orpheline de Braque, en lui permettant enfin de découvrir dans toute son ampleur et sa richesse une œuvre sous-estimée, parce qu’exigeante, rétive à toute facilité anecdotique et profondément pudique. […]

    George Braque en date : 

    1882
    Naissance à Argenteuil-sur-Seine le 13 mai 1882. Son père, Charles Braque, exploite une entreprise de peinture en bâtiment.

    1905
    Elève de Léon Bonnat à l’école des Beaux-arts. Au Salon d’automne, il découvre le fauvisme avec les peintures de Matisse, Manguin, Derain, Vlaminck, Marquet, Camoin.

    1906
    Naissance du Cercle de l’art moderne du Havre. Jusqu’en 1909, Braque, Othon Friesz et Raoul Dufy participent aux expositions annuelles de peintures fauves. En juin, à Anvers, premiers tableaux fauves. En octobre, premier séjour à l’Estaque : « C’est dans le Midi que j’ai senti monter en moi mon exaltation ».

    1907
    20 mars-30 avril : au Salon des Indépendants expose six paysages fauves. À l’automne, séjours à l’Estaque et à La Ciotat avec des paysages plus cézanniens. Fin novembre, au Bateau-Lavoir, Apollinaire le présente à Picasso.

    1908
    9-8 novembre : galerie Daniel-Henry Kahnweiler, première exposition personnelle, avec des paysages géométrisés, qui marquent les débuts officiels du cubisme. Le catalogue est préfacé par Apollinaire.

    1909
    Été à La Roche-Guyon près de Mantes, premiers paysages du cubisme analytique.

    1911
    Apparition dans la peinture de lettres et de chiffres imprimés au pochoir qui enrichissent le sens et la compréhension des œuvres.

    1912
    En Septembre, à Sorgues, création du premier papier collé, Compotier et verre, qui introduit un élément étranger dans l’œuvre d’art et permet la séparation de la couleur et de la forme.

    1913
    Naissance du cubisme synthétique. Les peintures intègrent les acquis des papiers collés, en imitent les matières et les signes typographiques.

    1914
    3 août : déclaration de la première guerre. Braque est mobilisé. Le 14 novembre, il est envoyé au front, dans la Somme.

    1915
    Le 11 mai, grièvement blessé en Artois, il s’arrête de peindre jusqu’en 1916.

    1917
    La revue de Pierre Reverdy, Nord-Sud , publie ses « Pensées et réflexions sur la peinture ».

    1919
    5-31 mars : Galerie de l’Effort moderne de Léonce Rosenberg, deuxième exposition personnelle, avec des natures mortes. Début de l’amitié avec Erik Satie.

    1922
    1er novembre-20 décembre : au Salon d’automne, les Canéphores représentent sa nouvelle inspiration classique.

    1924-1925
    Collaboration avec les Ballets russes de Serge de Diaghilev : Les Fâcheux. Zéphire et Flore. Salade pour les Soirées de Paris du comte de Beaumont. 2-21 mai 1924: première exposition chez son nouveau marchand Paul Rosenberg.

    1925
    Atelier construit par Auguste Perret à Paris près du parc Montsouris.

    1930
    Atelier construit par Paul Nelson, à Varengeville-sur-mer, où il s’installe une partie de l’année.

    1932
    Illustre la Théogonie d’Hésiode pour Ambroise Vollard. Cycle de peintures, gravures et sculptures d’inspiration mythologique.

    1933
    9 avril-14 mai : rétrospective à la Kunsthalle de Bâle. Le catalogue est préfacé par Carl Einstein, auteur de sa première monographie, en 1934.

    1939
    Installation à Varengeville-sur-mer pendant la guerre. Premiers essais de sculpture, ensemble de vanités austères et symboliques.

    1943
    Publication par Jean Paulhan de Braque le Patron.

    1944-1949
    Cycle des Billards.

    1946
    Nicolas de Staël le désigne comme « le plus grand des peintres vivants de ce monde »

    1947
    30 mai-30 juin : Première exposition, à la galerie d’Aimé Maeght, son dernier marchand. Rencontre le poète René Char.

    1948
    Prix de la XXIVe Biennale de Venise.

    1949-1956
    Série des Ateliers.

    1953
    Peint des Oiseaux pour le plafond de la salle Henry II du musée du Louvre.

    1954-1962
    Série des Oiseaux.

    1955-1963
    Cycle des derniers paysages de Varengeville-sur-mer.

    1963
    31 août : Mort de Braque.

    • Georges Braque du 18 septembre 2013 au  6 janvier 2014
    • Grand Palais entrée Champs-Élysées